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14/10/02
On
a tous gardé un épisode de la 4eme dimension dans un coin mal éclairé
de notre cerveau. Au moins un. Le noir et blanc presque granuleux (du
moins dans mon souvenir), l'incontournable theme hypnotique du générique,
et surtout l'homme en cravate qui n'avait rien, mais alors rien a foutre
au beau milieu d'un plan de la salle a manger ( j'ai d'ailleurs longtemps
esperé qu'un protagoniste de l'épisode en cours lui demande s'il comptait
rester longtemps). Tout ça c'est deja plus que la 4eme dimension seulement:
c'est un morceau de mémoire collective.
Personnellement,
je dois a la série de Rod Sterling une de mes phobies les plus viscerales,
une peur d'enfant irraisonnable parce qu'elle prend ses racines quelque
part en dessous de la raison, bien ancrée dans l'inconscient: je veux
parler du malaise que m'occasionne la seule proximité d'une poupée.
Mais attention. Il faut que ce soit de la poupée classique hein, de la
bonne poupée Bella, de celles qui tronent sur l'armoire de votre grand
mere et qui attendent que vous soyez seuls dans la piece pour tourner
leurs yeux morts sur vous. Qui n'a jamais eu l'impression d'etre observé
par une poupée? Cependant, on ne peut pas les surprendre. J'ai passé des
heures d'angoisse a fixer du coin de l'oeil ces démons de plastique pour
tenter de capturer leur regard en tournant vivement la tete, mais elles
ont du metier. Elles consacrent leur immobilité a l'amélioration de leur
technique. La frayeur, c'est bien sur de se retrouver un jour dans la
chambre d'amis d'une tante éloignée quand vous avez 10 ans et d'allumer
la lumiere au beau milieu de la nuit en craignant que la poupée ait changé
de place. Plutot dormir dans le placard avec le loup.
Cette
phobie qui est la mienne fonctionne aussi avec les marionettes de ventriloque
en bois. Et puis avec les pantins d'une façon générale, pour peu qu'on
les sente habités. On peut aller jusqu'a exiger un certain raffinement
dans l'aspect de ces monstres domestiques, en particulier sur les tares
physiques dont ils peuvent etre affublés, qu'il s'agisse de membres désarticulés,
de meches arrachées ou meme d'yeux crevés. Personnellement j'ai connu
une poupée qui cumulait les trois, mais a ce niveau d'horreur ça devient
quasiment de la gourmandise.
Pour
en revenir a mon épisode de la 4eme dimension, on y voyait Telly Savalas,
Kojak donc, mais jeune, et ce pauvre Telly découvrait que la poupée de
sa fille était vivante. Bien evidemment, des que la famille était au complet,
la poupée ne bronchait pas, mais aussitot qu'elle se retrouvait seule
avec Kojak, elle disait des choses qu'une poupée bien elevée ne dirait
pas. Alors un jour, ce brave Kojak qui était deja chauve a l'epoque décide
d'en finir avec le jouet de sa fille en lui écrasant la tete dans un étau.
Pas à sa fille hein. Cette scene est d'ailleurs restée profondément imprimée
dans ma tete, on y voit un plan rapproché de la poupée qui continue a
dire a son bourreau qu'elle va le tuer. Il faut deja avoir une certaine
confiance en soi pour déclarer ce genre de menaces a Kojak quand il est
en train de vous rapprocher les tempes, mais en plus elle continuait a
gueuler une fois enfermée dans la poubelle.
A la fin de l'épisode, la fillette pleure son jouet disparu mais Kojak
est bien content. Nous aussi. Jusqu'a ce qu'il se brise la nuque au bas
de l'escalier en trébuchant sur devinez quoi? Non non, pas un poulpe.
Sur la poupée! Atroce plan final sur les petits yeux maléfiques de la
créature qui pousse au passage le plus effrayant des "je t'aime maman"
quand la petite fille la prend dans ses bras.
Hormis
le traumatisme qu'il peut susciter a long terme, cet épisode a deux avantages:
D'abord il nous apprend d'ou vient Chucky. Ensuite il nous fait ralentir
dans les escaliers.
Pensées
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